Cette femme est remarquable.
Pensez-donc, elle est l’auteur d’une sorte de “Bible pour les nuls” de la société française de demain. Du moins, si tout les projets mis en oeuvre par le gouvernement actuel aboutissent.C’est la classe, non? Comme j’aimerais avoir cette influence…Une intellectuelle, obsédée par la sexualité, féministe. Et puis elle a le sens du scandale: dernièrement encore avec son livre sur ce mi-homme-mi-cochon-qui-n’est-pas-DSK.
Marcela Iacub a tout pour me plaire. Enfin, presque.
C’est en 2005 que je découvrais son Antimanuel d’éducation sexuelle. Elle y exposait ses théories sur le Sida par exemple: “ce n’est qu’en banalisant la sexualité, en assouplissant cette barrière si forte qui sépare les choses du sexe du reste des comportements de notre vie, en rompant cette association sinistre qui les lies à l’amour et parfois à la mort, qu’on facilitera les comportements rationnels dans la gestion des risques qui lui sont liés, comme on le fait dans d’autres domaines de la vie”(p.121); ou encore sur le viol: “On devrait surtout comprendre qu’une société qui fait d’un crime [le viol] qui ne laisse aucune trace, qui ne produit aucun handicap physique, dont les dommages restent indéfinissables et pour une part autoallimentés, qu’une société, donc, qui fait d’un crime bien souvent indémontrable, un crime maximal, ne peut aller que vers les pires entorses aux libertés publiques” (p. 196).
Et puis, je me souviens encore de son fameux chapitre sur “Postsexopolis”. Postsexopolis c’est un pays où « chacun se fait lui-même l’idée de ce qui est sexuel ou non, et nombreux sont ceux qui ne se posent plus la question » (p. 310). Postsexopolis, c’est un pays où “il n’y pas de minorité sexuelle : à Postsexopolis, ce n’est pas la loi qui vient dire quand un individu est sexuellement majeur”. Mais elle nous rassure un peu quand même “les pénétrations génitales ou anales sur des enfants impubères sont automatiquement considérées comme des violences, que l’enfant se prétende « consentant » ou non : question d’anatomie” (p.315). Ouf, elle n’a pas osé aller jusqu’au bout de son système. D’autres s’en chargeront comme ce parti politique Hollandais militant pour la dépénalisation de la pédophilie. Passons.
Mais encore, à Postsexopolis l’enfant n’est pas un don mais l’objet d’une volonté, un dû.
- « En effet : quelle que soit la technique utilisée, qu’il s’agisse du coït hétérosexuel fécond ou d’une autre, on considère que les enfants naissent de la volonté d’un, de deux voire de plusieurs individus qui en sont considérés comme les « auteurs » (p.320).
- « L’adoption est la forme de filiation la plus prisée et le modèle de toutes les autres, car on pense que la parenté ne peut jamais reposer que sur la volonté. Un grand nombre de gens préfère d’ailleurs avoir des enfants individuellement. D’autres vivent en collectivité. D’une manière générale, il y a une grande diversité des formes familiales » (p. 320). Et plus loin, Marcela Iacub poursuit:
- « C’est ainsi qu’on a mis fin aux distinction (qui existent encore dans notre droit français) entre les hommes et les femmes. (…) Cela à permis à l’égalité économique entre les hommes et les femmes de faire un bond définitif. (…) grâce à la fin de ces inégalités en matière de reproduction, grâce à la fin des distinction entre les hommes et les femmes du point de vue juridique, à Postsexopolis se sont développées beaucoup de manières d’êtres des sujets sexués. » (p 320-322)
En d’autre terme, sa pensée peut se résumer ainsi: “nous avons voulu libérer le sexe, mais c’est du sexe que nous aurions dû nous libérer“.
À Postsexopolis, le sexe est comparable à un dessert. Il peut être meilleur ou moins bon.
Elle est géniale, non? Prédire ainsi les mouvements sociétales actuels, chapeau. Non, j’insiste.
C’est aussi une femme pour qui j’ai de la reconnaissance. Marcela Iacub a considérablement influencé mon choix d’opposer à mon activité intellectuelle une écoute et un accompagnement bienveillant des personnes. Pour ne pas me déconnecter à ce point de la réalité, pour ne pas m’enfermer dans un système de pensée où tout se tient car l’humain est évacué. Son projet me fascine car il concentre tous les fantasmes à l’état brut. L’objectif est d’entrer dans une ère qui dépasse la sexualité. Pourquoi? Parce que la sexualité est signe de différence. Considérer le sexe comme une caractéristique physique équivalente à la couleur de la peau, c’est effacer une différence fondamentale, justement cette différence qui nous ramène sans cesse à nos limites, à notre condition humaine.
Ah… Ma vie aurait été tellement plus tranquille, tellement plus facile si j’étais restée comme elle dans mes livres! Je repense parfois avec nostalgie à mes années étudiantes où j’osais proclamer des idées tranchées sans y mettre la moindre nuance. Mais je suis surtout envahie par le regret d’avoir pu être trop souvent à ce point déconnecté de la réalité de ceux qui m’entourent. Les années ont passé, l’amour et la maternité ainsi que les heures d’accompagnement m’ont changé. Ils me conduisent à mettre sans cesse la personne humaine au coeur de ma réflexion plutôt que de m’évader dans un monde d’idées.
Marcela Iacub est pour moi un modèle, à ne pas suivre.